Le Directeur Général du CICIBA reçoit une haute distinction scientifique et culturelle :
« GRANDE BENEMERITO DA CULTURA TRADITIONAL BANTU BRASILEIRA »
São Paulo s’est réveillé ce matin-là du 12 octobre2017 tout en blanc. Couleur de la pureté bantu, couleur de l’humilité et couleur de la fraternité bantu, au Brésil. L’événement ? L’ouverture des travaux du colloque international sur les cultures afro-brésiliennes. Invités de marque, le CICIBA, l’Angola, la Fondation Sindika, l’Université de São Paulo, chercheurs américains,autorités politiques brésiliennes, les têtes couronnées des « terreiros » bantu et yoruba venus de tous les horizons du Brésil (Salvador de Bahia, Cariacica, Mina Gerais, São Paulo, Rio de Janeiro, etc.). Invité d’honneur : CICIBA.
Doublé d’une cérémonie solennelle de remise de distinction honorifique, la rencontre de Sao Paulo a donné lieu ce jour à un faste indescriptible. Plusieurs centaines d’afro-descendants ont rendez-vous au siège de l’Institut latino-américain pour les cultures afro-bantu (ILABANTU).
Invité spécial à cette rencontre des cultures, le CICIBA a été représenté par son Directeur Général, le professeur Antoine Manda Tchebwa, accompagné de son collaborateur MwapongoThinos, chargé des relations publiques du Centre.
A son arrivée au terminal 3 de l’aéroport de Sao Paulo, la délégation du CICIBA a eu droit à un accueil chaleureux et fraternel de la part du Professeur WalmirDamesceno dos Santos TaataKwaNkisiKatuvanjesi, coordonnateur Général de l’Institut. Tout heureux de recevoir le CICIBA, il s’est déclaré honoré et satisfait de recevoir des « frères bantu venus partagés la fraternité afro-brésilienne bantu ». Il y avait dans son regard les marques d’une allégresse qui disait une grande émotion et un soulagement, tout à la fois, à l’idée que le CICIBA tant était là. Bien représenté, au plus haut sommet.
Après l’accueil, arrive le temps de la célébration. Dans une ambiance cordiale, assortie d’une décoration de grande circonstance, devant de grands détenteurs des cultures bantu du Brésil et les invités venus de l’étranger, toutes les allocutions de circonstance saluent la présence du CICIBA au Brésil, réitèrent leurs attachements aux traditions bantu. Au passage quelques propos teintés de protestation à l’endroit d’un certain fondamentalisme religieux qui s’attaque aux « terreiros » bantu et yoruba ne manquent pas de montrer le fossé qui existe entre les valeurs africaines promues par les détenteurs brésiliens des cultures afro-brésiliennes et les promoteurs des Eglises de réveil locaux. Le décor est ainsi planté, préparant aux grandes envolées des débats sur une thématique qui secoue le milieu afro-brésilien dans son ensemble.
Dans certaines prises de positions des recommandations sont même adressées au CICIBA, médiatrice naturelle dans ce type de conflit idéologique, estime-t-on, pour un accompagnement conséquent.
Les débuts des travaux, c’est pour tard en fin de journée. Voici arrivée l’heure de la célébration. A l’appel du maître de cérémonie, le professeur Antoine Manda Tchebwa rejoint le pupitre aux côtés du professeur WalmirDamescenodios Santos Tata KwaNkisi. Sa respiration se sent à deux centimètres. Le mystère est encore entier. Puis arrive une dame vêtue de blanc, assortie des perles autour du cou, avec dans ses mains, un colis emballé dans un tissu blanc. Prenant aussitôt la parole, le coordonnateur de ILABANTU engage aussitôt son laudatio : « Estimé Excellence Antoine Manda Tchebwa, c’est pour moi un grand honneur de vous présenter nos compliments en votre qualité de Directeur Général du CICIBA. En reconnaissance de vos importants et inestimables travaux et actions de promotion et de valorisation du dialogue interculturel et scientifique entre le Brésil et les différentes communautés afro-brésilienne d’ascendance bantu. Par ce geste nous affirmons notre volonté renouvelée de construire une forte relation transatlantique en vue des échanges intellectuels, culturels, linguistiques et spirituels plus forts. Toute en vous félicitant pour cette reconnaissance brésilienne, nous vous remercions sincèrement d’avoir répondu à notre invitation. »
S’ensuit la remise de la distinction. Un magnifique diplôme encadré de verre et accompagné du texte, en portugais » du laudatio.
En réponse à tant d’amabilités, le Directeur Général du CICIBA a prononcé les mots suivants :
« Mesdames et Messieurs
Chers frères et sœurs du Brésil
Dans notre agenda, le mois d’octobre 2017 est marqué par un événement majeur : la rencontre fraternelle des deux mains longtemps tendues. Celles du CICIBA et de ILABANTU. Deux institutions sœurs partageant une même ambition : redire la destinée et le destin de l’être bantu dans toute sa majesté, dans toutes ses dimensions (humaniste, anthropologique, historique, profane et sacrée).
L’événement de ce 12 octobre 2017, qui a lieu à São Paulo,a toute son importance à nos yeux. D’autant que la prestigieuse distinction brésilienne dénommée « Grand Mérite de la Culture traditionnelle Bantu brésilienne », qui nous est attribuée ce jour par ILABANTU, incarne tout un symbole. C’est l’expression solennelle de la reconnaissance, par la partie brésilienne, de l’importante contribution du CICIBA, sous l’autorité déterminée de ses instances(la Conférence des Ministres de la culture des Etats bantu, le Conseil d’Administration et la Direction générale, à la préservation) à la valorisation et à la promotion des civilisations bantu à travers le monde. Missions du reste prescritesde longue date à notre Institution dans l’urgence d’un devoir de mémoire, à partir du Gabon, par nos pères fondateurs, à l’initiative de SEM le Président Omar BONGO ONDIMBA d’heureuse mémoire.
Avec le Brésil, l’Afrique a en commun une glorieuse mémoire bantu, vieille de plus de quatre siècles. Avec ILABANTU, le CICIBA a en partage la volonté de revisiter, au moyen des recherches les plus pointues, l’Afrique bantu de nos désirs communs. Cela à travers l’histoire des migrations et des sédentarisations successives, à travers les cultures, coutumes et traditions, des cosmologies et cosmogonies, anciennes et nouvelles, et à travers tant d’autres investigations capitalisées à l’échelle de l’espace culturel bantu. Cela, depuis le foyer primordial de la Bénoué(au sud du Nigéria) jusqu’à Cape Town (en Afrique du Sud). Puis, enjambant mers et océans dès le XVe siècle, jusqu’aux Amériques.
C’est le lieu de saluer le courage et la ténacité des chercheurs du domaine bantu, grâce à qui nous savons aujourd’hui que les Bantu étaient, dès leur origine, une communauté d’hommes braves, hardis, inventifs… Un ensemble des peuples accoucheurs d’eux-mêmes, donc fondateurs de civilisations vivantes et créatives. En effet, comme l’a reconnu en son temps l’humaniste français Victor Schœlcher dans une de ses célèbres vulgates fustigeant la pratique négrière dans l’émoi létal de la servitude des Africains :
De longue date, « les Bantu savaient bâtir des maisons, administrer des empires, construire des villes, cultiver des champs, fondre le minerai, tisser le coton, forger le fer.
Leur religion était belle (…). Leurs mœurs agréables, fondées sur la solidarité, la bienveillance, le respect de l’âge. Entre eux, il n’y avait aucune coercition, mais l’entraide, la joie de vivre, la discipline librement consentie. (…) une chaîne continue de compréhension et de confiance. Comme artistes, les Bantu avaient leur magnifique statuaire et leurs masques rituels, où l’émotion humaine explose pour redistribuer les forces les plus secrètes de l’univers… »
Tout comme hier, leurs langues sont aujourd’hui encore source d’un humanisme débordant. Langues qui, partout où elles s’expriment dans la diversité de leurs accents, donnent aux Bantu sens et contenu ; langues qui consolident leur humanité et leur dignité ;langues qui stimulent la force de transformation de l’Afrique et sa diaspora dans le dialogue des nations et des civilisations.
Les Bantu sont un modèle de courage et source de fierté. A preuve, ici même au Brésil, en fondant le célèbre Quilombo de Palmarès, sous la conduite du Général d’armée Nzumba, un Jaga arraché d’Angola, et ses compagnons de lutte, ils ont su administrer aux colons en 32 ans de lutte une belle leçon d’humanité en posture de marron quasi invincible, meilleur revers de la résistance contre toute forme d’iniquité.
C’est un tel héritage, riche de son essence singulière, que le CICIBA,porté par ses 11 Etats membres statutaires, s’est toujours employé à promouvoir avec la force de sa conviction,la lucidité de sa vision et la flamme de sa passion pour l’identité bantu.
Je voudrais donc remercier vivement les organisateurs de cette cérémonie, l’Ambassade du Brésil à Libreville au Gabon, et leur dire combien je suis honoré par ce geste fraternel. Je tiens en plus à leur assurer que le CICIBA vient, ici au Brésil, consolider le pont de l’unité qui existe entre les Bantu d’Afrique et ceux des Amériques, autant qu’il vient sceller et célébrer à São Paulo une « bantuité »d’âme, de cœur et de sang.
C’est ensemble qu’il nous faut désormais réécrire les chapitres laissés vides par l’amnésie négrière, dont le silence bourdonne encore dans nos oreilles comme pour nous rappeler une vérité essentielle : redire sa propre histoire est un acte de foi ; c’est un acte de refondation de soi, un acte de renaissance en soi.
Nous sommes du côté d’une humanité paritaire et de pleine jouissance.
Nous sommes du côté d’une bantuité qui élève et unit dans un élan de générosité et de fraternité partagées.
Nous sommes d’hier, d’aujourd’hui et de demain.
Longue vie au CICIBA et à ILABANTU.
Je vous remercie. »
Au terme de cet échange, les deux Institutions ont procédé à la signature d’un protocole d’accord de coopération, le premier du genre en Amérique. Qui consacre l’implantation du CICIBA en Amérique. Première étape d’une série d’accords qui a commencé avec l’Université de la Guyane française (Georgetown), et qui bientôt se poursuivra aux Etats-Unis et aux Antilles.
Un verre d’amitié a sanctionné cette cérémonie, haute en couleur, qui plus est chargé d’une très grande fraternité, autour d’une prestation d’un groupe de samba traditionnelle brésilienne de si bon cru. Les choses ne font que commencer.